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Pensées du jour
3 septembre 2008

La rentrée

Chaque année, depuis que mes études me le permettent, je partage ce moment de bonheur avec les élèves et les instits de l'école maternelle ou officie (et je n'ai pas dit sévie!) ma maman ! Ecole magnifique, ambiance agréable bref une école qui permet à chaque enfant d'évoluer du mieux possible (un souffle d'air pur pour certains d'entre eux, mais j'y reviendrai plus tard...)

Ce 2 septembre, 9H, les parents arrivent dans la cour, sous un soliel éclatant. Je sens le trac qui monte crescendo depuis hier chez les instits et les indispensables aides maternelles. Ce n'est pourtant pas leurs premières rentrées, mais une nouvelle année qui commence est toujours décisive pour tous...

la directrice fidèle à son habitude, fait un petit speetch (tiens, je préfère le sien à celui qui durait des heures de mon ancienne proviseur... que j'ai quand même supporté 4 ans... mais revenons à nos moutons!) Donc après le petit discours, l'appel de la classe verte, les "GRANDS", c'est-à-dire, la grande section de maternelle, juste avant de partir au CP.
Il manque 4 élèves à l'appel, mais dans l'ensemble, ça se passe plutôt pas mal. Ils se rangent plus ou moins correctement, à peine un petit coucou à Papa, Maman et hop, zou c'est partie. On sent l'assurance de ces bouts de chou qui connaissent pour la plupart depuis plus de 3 ans cette école et les instits qui travaillent en équipe, dans une école qui le permet parfaitement.

Les 28 mômes rentrent dignes et fiers comme des pans dans l'école, en silence, comme le demande la maîtresse pour tout de suite commencer avec les bonnes habitudes...
La directrice qui a la classe bleue (comprenez, la moyenne section) décide de faire l'appel des petits: 31 petits de 3 ans qui pour la grande majorité d'entre eux n'ont pas ou très peu quitté leurs univers familiaux respectifs... On commence l'appel, ils arrivent avec leurs sacs plastiques, remplis de toutes les affaires scolaires qu'il leur faudra cette année (mouchoirs, savons, chaussons, changes) que nous, les adultes récupérons comme nous pouvons (pourvu que les parents aient mis le nom sur le sachet!) mais nous n'avons pas le temps de vérifier... les premiers petits loups ne comprennent pas bien ce qui se passe, mais lorsqu'ils comprennent que Papa, Maman, Tatie, Tonton, Mamie, Pépé, la grande soeur et le neveu ne viendront pas avec eux dans cette immense école, la peur les saisi au vol et nos oreilles commencent à en prendre un coup...

Ils ne veulent pas quitter les bras de leurs parents et surtout surtout ne pas aller dans les bras de ces gens là, qui semble presque enlevé les petiots... Certains d'entre eux se demandent ce qui se passe, mais s'en vont plus tranquillement dans la classe.

Pour ceux qui hurlent, la partie est loin d'être gagnée, parce que pour les parents aussi l'affaire est dure. Ils essaient donc d'accompagner leurs bouts de chou le plus loin possible dans l'école, ce qui n'arrange pas nos affaires.

Bon, tous les bambins sont dans la classe, la porte de la classe est fermée, la barrière dans le couloir aussi sans oublier la porte d'entrée, faudrait pas qu'il y ait un môme qui se fasse la malle... surtout qu'en plus nous ne les connaissons pas encore!

Nous mettons difficilement les parents à la porte (ne vous inquiétez pas, ils vont finir par s'arrêter, mais si vous restez là, ça va être pire, c'est normal, ils vont s'habituer, on connait notre métier, ce n'est pas la première rentrée... oui oui je vais lui moucher le nez. Oui, je vais lui enlever sa veste. non, ce n'est pas vous qui allez le faire, non, c'est une impression, nous savons exactement ce que nous faisons, et nous ne sommes pas en panique ni débordé... oui, la sortie, c'est à 11h30... pas facile!)

Entre temps, la classe bleue a pris possession des locaux... le pas légèrement moins assuré que leurs aînés, mais pas de pleurs, ah une année d'école change déjà toute la donne!

Je mets activement la main à la pâte. Au mois de février, l'école a perdu son statut de "zone sensible". Pour faire simple, c'est la même chose qu'une ZEP mais avec moins de moyens et surtout la possibilité de perdre à tout moment ce statut... qui permet en fait d'ouvrir une classe supplémentaire à partir de 84 enfants inscrits et non pas 93 comme dans toutes les autres écoles. Mais l'école a perdu ce statut par l'opération du saint esprit (ou devrais-je dire par l'opération du saint sarkozy?) Supprimer 11 800 postes d'instits en une seule rentrée, il faut bien les trouver les classes à fermer... ou à ne pas ouvrir... c'est donc cette école qui en a patie. 31 petits de 3 ans, 29 petits de 4 ans, 29 petits de 5 ans... avec 3 instits et 2 aides maternelles. ce qui fait une moyenne de 17.60 gamins par adultes...

En plus, il faut bien le dire, ce n'est pas une population qui n'a aucun soucis à se faire. Je m'explique, c'est une population dite défavorisé principalement économiquement. En régle général, disons pour la TRES TRES grande majorité, ils habitent dans des habitations collectives (comprenez des blocs), dans une misère sociale pour certains d'entre eux que nous ne pouvons même pas nous imaginer ( "mon père i boi de la bièr et du wissie" 5 ans le marmot qui te dit ça...)

Bien sûr, il y a des gamins qui ont une vie parfaitement équilibré aussi bien à la maison qu'à l'école, il n'empêche que beaucoup ont de gros problèmes familiaux et que s'occuper de 17.60 gamins par personne relève presque du miracle, ou alors, ne pas s'en occuper autant qu'ils en auraient besoin. Pour eux, l'école est une porte de sortie, ne gachons pas leurs chances dès le départ...

L'asistant pédagogique présent ce jour làa bien préciser au téléphone qu'une 4eme classe ne serait pas superflu... En discutant avec C. qui travaille en collège ZEP, nous arrivons à la même conclusion, les technocrates et bureaucraes qui nous commandent devraient venir un peu plus sur le terrain pour voir ce que c'est que la vie, pas celle de leurs mômes qui grandissent à Neuilly, non celles des enfants qu n'ont pas les mêmes chances...

Pour finir, quelques perles (et oui, dès le premier jour !) :

- D. ne veux pas retourner à l'école l'après-midi, il fait un peu de ciné chez son père qui est assez ferme. D. se dirige donc vers sa maman et lui dit (il a 3ans) : "j'ai besoin de toi maman!" (ou comment faire fondre en larme une maman déjà bien éprouvée par la journée !!!

- M. 3 ans pleure. J'essaie de le consoler comme je peux en lui carressant la joue. Réponse de M. "Touche moi pas!"

- Ab. 5 ans doit dessiner sa famille (papa maman et eventuellement frères et soeurs). Quand la maîtresse lui demande qui sont ces gens:
" - bein là c'est moi, là c'est papa, là c'est Alfred mon grand frère.
- Ah bon ?
-  Et là c'est aussi mon grand frère. il s'appele Alfred. Et ça c'est mon autre grand frère.
- et comment il s'appelle ?
- heu...."
arrive sa maîtresse de l'année dernière ... M. tu peux peut-ête nous aider à déméler l'histoire ... Ah bein, il est fils unique c'est sûr...

- même travaille pour L. Elle a fait 6 ou 7 bonhommes mais sa famille n'est pas si grande. Alors la maîtresse demande qui sont ces gens ? Réponse immédiate ... "des gens qui passaient par là!"

bref, enfin une bonne nouvelle... mercredi matin, un mail informe qu'il y a une ouverture de classe! Super! les maitresses appellent leurs maris... "comment ça c'est déjà écrit dans le journal?" u comment se gargariser avant même que les principales concernées soient au courant!!!

bon courage, les filles !

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Commentaires
M
pas de souci marie ! ça me flatte ;-)
M
Je me suis permise:<br /> Ton blog est à l'origine d'un post.
E
Joliment raconté par quelqu'un qui a eu une vue d'ensemble , car les instits elles avaient le "nez dans le guidon" et travaillaient pour que tout se passe le mieux possible (ou le "moins pire")et qu'en retournant à la maison chaque petit puisse dire au reste de la famille"c'était chouette l'école, la maîtresse est gentille!".
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